L’entretien préalable, étape nécessaire à toute mesure de licenciement, répond à des exigences de forme et de fond que la Cour de cassation ne cesse de préciser au fil de sa jurisprudence. Retour sur les décisions marquantes de l’année 2023.

1ERE ETAPE : LA CONVOCATION A ENTRETIEN PREALABLE

• Comment se décompte le délai de 5 jours devant être respecté entre l’envoi de la convocation et l’entretien ?

La convocation à entretien préalable est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge.

S’agissant du délai de convocation, l’article L. 1232-2 du Code du travail prévoit que « l’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation ».

Précisant les règles de décompte du délai de cinq jours, la Cour de cassation rappelle que celui-ci commence à courir à compter du lendemain de la première présentation de la lettre de convocation au domicile du salarié, peu important la date à laquelle ce dernier la récupère.

Ainsi, la lettre recommandée avec accusé de réception adressée par l’employeur le 10 janvier 2018 pour un entretien fixé au 24 janvier 2018 respecte le délai légal de 5 jours, peu important que celle-ci n’ait été retirée à la poste que le 22 janvier 2018 (Cass. Soc., 6 septembre 2023, n° 22-11.661).

 La convocation doit-elle mentionner les motifs pour lesquels le licenciement est envisagé ?

L’article L. 1232-2 du Code du travail ajoute que « cette lettre [de convocation] indique l’objet de la convocation. »

La convocation doit indiquer au salarié l’objet, la date, l’heure et le lieu de l’entretien ainsi que la faculté dont celui-ci dispose de se faire assister.

La Cour de cassation considérait déjà que les motifs pour lesquels le licenciement est envisagé n’ont pas à figurer dans la lettre de convocation (Cass. soc., 6 avril 2016 n° 14-23.198), sauf dispositions conventionnelles contraires (Cass. soc. 9 janvier 2013, n° 11-25.646).

Toutefois, la Cour de cassation a récemment rappelé que les juridictions de fond doivent contrôler si la clause d’un règlement intérieur de l’entreprise qui impose à l’employeur d’informer le salarié, dans la lettre de convocation à l’entretien préalable au licenciement, des griefs retenus contre lui, constituait une garantie de fond dont le non-respect priverait le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 13 septembre 2023, n° 21-25.830).

• Quelles sont les mentions obligatoires s’agissant des règles d’assistance du salarié pendant l’entretien ?

La lettre de convocation à l’entretien préalable au licenciement doit mentionner les modalités d’assistance du salarié protégé applicables en fonction de la situation de l’entreprise.

Lorsque le salarié concerné est le seul représentant du personnel dans l’entreprise, cette situation étant assimilable pour l’intéressé à celle d’une entreprise dépourvue de représentant du personnel, elle doit mentionner la possibilité pour le salarié convoqué de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou par un conseiller du salarié. (CE 4e-1e chambre, 13 octobre 2023, n° 467113).

A défaut, la procédure pourrait être considérée comme irrégulière, sauf à établir que le salarié a été pleinement informé, en temps utile, des modalités d’assistance auxquelles il avait droit, en fonction de la situation de l’entreprise, pour son entretien préalable, ce qui était le cas en l’espèce.

• Une salariée en congé maternité peut-elle être convoquée à un entretien préalable ?

Si l’entretien est obligatoire, même en période de suspension du contrat de travail, et quel que soit l’effectif de l’entreprise, l’ancienneté du salarié et le motif du licenciement, perdure une exception : l’employeur ne peut convoquer à un entretien préalable une salarié pendant le congé maternité (Cass. soc., 29 novembre 2023, n° 22-15.794).

Ainsi, l’envoi d’une lettre de convocation à un entretien préalable pendant la période de protection dite « absolue » liée à la maternité constitue une mesure préparatoire au licenciement qui entraîne la nullité de ce dernier, peu important que l’entretien ait lieu à l’issue de cette période.

2EME ETAPE : LE DEROULEMENT DE L’ENTRETIEN PREALABLE

• Les frais de déplacement pour assister un salarié sont-ils remboursés ?

Le salarié, assistant un autre salarié lors de l’entretien préalable au licenciement ou à une sanction disciplinaire, ne doit, du fait de l’assistance qu’il prête, subir aucune perte de rémunération.

Les frais de déplacement exposés par le salarié afin d’assister d’autres salariés de l’entreprise convoqués à un entretien préalable doivent donc lui être remboursés par l’employeur (Cass. soc., 6 septembre 2023, n° 22-14.184).

• Qui est autorisé à conduire à l’entretien ?

S’agissant des participants, la Cour de cassation rappelle que le directeur d’une société, missionné comme consultant externe par le groupe et mandaté pour agir au nom et pour le compte du représentant légal d’une autre société du même groupe en matière de gestion des ressources humaines, peut mener l’entretien préalable au licenciement d’un salarié de cette dernière (Cass. soc. 28-6-2023 n° 21-18.142).

• Est-il possible d’enregistrer l’entretien préalable pour le produire en justice ?

Alors qu’elle considérait depuis 2011 que la preuve obtenue de manière déloyale ne pouvait être recevable en justice, la Cour de cassation réunie en Assemblée plénière vient d’opérer un revirement de jurisprudence.

Elle admet dorénavant que, dans un litige civil, une partie puisse utiliser une preuve obtenue de manière déloyale pour faire valoir ses droits, à condition que celle-ci soit indispensable à l’exercice de ses droits et ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux de la partie adverse (vie privée, égalité des armes etc.).

Il en est notamment le cas, dans le cadre de la contestation par le salarié de son licenciement pour faute grave, de l’enregistrement sonore produit par l’employeur et obtenu à l’insu du salarié au cours duquel il avait tenu des propos ayant conduit à sa mise à pied.

Se faisant, il pourrait être permis à l’avenir au salarié de produire en justice l’enregistrement de l’entretien préalable, même obtenu à l’insu de l’employeur, si celui-ci est indispensable à l’exercice des droits de sa défense…

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